Andrew Glencross a été nommé directeur d’ESPOL en juin 2023. Diplômé de l’Université de Cambridge (Royaume Uni) et Docteur de l’Institut Universitaire Européen de Florence (Italie), il a enseigné dans des Universités américaines et anglaises avant de rejoindre ESPOL en 2021. Spécialiste de l’Europe et des relations internationales, il inscrit sa mission de direction d’ESPOL dans la consolidation des avancées pédagogiques et dans l’innovation, en partenariat renforcé avec les forces vives de l’Université catholique de Lille.

Un profil très européaniste

Il rejoint ESPOL en septembre 2021 comme maitre de conférences en sciences politiques et relations internationales, disciplines très fortement interreliées selon lui : « Mon profil est très européaniste dit-il. L’étude de l’Europe et de l’Union européenne est une clé d’entrée pour comprendre l’évolution des Etats, ce qui fait avancer les peuples des différents pays d’Europe et l’histoire des relations diplomatiques ».

« On étudie la fabrication des textes de loi »

Il intervient dans les Licences et les Masters d’ESPOL à plusieurs niveaux.

En Licence européenne de science politique. « Nous simulons avec les étudiants la façon dont se passent les négociations au sein du Parlement européen lors de l’étude des textes de loi et du vote des amendements. Il faut faire comprendre aux étudiants les enjeux des politiques européennes, le fonctionnement des instances au regard des attentes du public. On étudie la fabrication des textes de loi tels que le Pacte vert, proposé par la Commission Européenne pour rendre l’Europe climatiquement neutre en 2050 ».

Comprendre l’Europe et ses institutions complexes, parfois opaques

Il intervient également dans le Master’s in multilevel governance in Europe, sur l’analyse des défis contemporains de la politique européenne. Des sujets sensibles sont à l’étude en ce moment, comme ceux concernant l’énergie, les interconnexions, les migrations.

Pour Andrew Glencross, les instances européennes forment un ensemble complexe, parfois opaque. On y travaille sur la base de positionnements nationaux dans une logique intergouvernementale.

Au Parlement on mesure bien l’intervention importante des groupes politiques et des élus de chaque pays. « Nous préparons nos étudiants à découvrir, comprendre, explorer les textes de loi européens. En tenant le plus grand compte de leurs impacts sur les populations et la vie économique, sociale, culturelle des différents pays européens. Sans oublier que la législation européenne touche aussi les pays en dehors de l’Europe. On voit bien, par exemple, que le vote, en mars dernier, de la fin des moteurs thermiques dans les voitures neuves à partir de 2035 comporte aussi des enjeux et des contraintes majeures pour les constructeurs automobiles du monde entier. Tout cela, nos étudiants doivent l’appréhender et le prendre en compte ».

ESPOL : consolider, innover, s’inscrire dans le territoire

Quelles sont les priorités d’Andrew Glencross à la direction de l’école ? « Nous voulons consolider les avancées pédagogiques, toujours innover, développer des travaux de recherche utiles au territoire, insérer encore davantage l’école dans la dynamique de l’Université catholique de Lille » répond-t-il.

« Insérer ESPOL dans la dynamique de l’Université catholique de Lille »

« Nous accueillons plus de 1000 étudiants en cette rentrée 2023, dont 100 dans la nouvelle licence Philosophie, Politique et Economie qui vient d’ouvrir. L’école est attractive car elle répond à l’aspiration des jeunes à suivre une formation bilingue axée sur les grands enjeux du monde contemporain et les défis que l’Europe doit relever ».

Le recrutement est de plus en plus international grâce au partenariat avec les lycées français de l’étranger, avec Campus France et avec certains pays comme la Malaisie.

Les diplômés – dont bon nombre s’impliquent dans la vie de l’Ecole lors des accueils, des modules de professionnalisation, des recherches de stages – se placent dans la fonction publique française et européenne, dans les collectivités territoriales, dans le secteur privé : entreprises industrielles, cabinets conseils, communication et journalisme, ONG, associations œuvrant dans les domaines sociaux, de l’environnement, de la politique de la Ville…

ESPOL-LAB : la recherche au cœur des évolutions de l’Europe

Pour Andrew Glencross, « en un peu plus de 10 ans, notre centre de recherche ESPOL-LAB est devenue une équipe reconnue en sciences politiques, en relations internationales, en philosophie politique et sur les questions de l’environnement et du développement ».

ESPOL-LAB se donne comme mission d’analyser les enjeux politiques européens et les dilemmes transnationaux pour éclairer notre société concernant trois domaines.

Premier domaine : la qualité de la démocratie, souvent mise à l’épreuve, par la montée des populismes par exemple. Le rôle des partis politiques et des gouvernements se transforme et la position des états-nations change au sein de l’Europe. Les recherches portent sur la représentation politique (élections, partis, Parlement), sur les nouveaux espaces de la démocratie : démocratie directe, démocratie numérique.

Deuxième domaine : les reconfigurations de l’international, qui peut se comprendre comme un régime de limites et de distinction entre citoyens et étrangers, entre politique intérieure et politique extérieure, entre la sécurité intérieure et la défense nationale par exemple. Parmi les travaux de cet axe : la sécurité internationale et les organisations régionales de sécurité ; les conflits armés, la guerre et la stratégie militaire ; le terrorisme et l’antiterrorisme.

« Repenser notre relation à la planète »

Troisième domaine de recherche : les politiques de l’Anthropocène les plus à même de repenser notre relation et celle des Etats à l’environnement, à la planète. Les chercheurs étudient les réponses sociales et politiques à la crise environnementale ; les visions et chemin vers un changement collectif et une réorganisation radicale des relations entre la société et la nature.

ESPOL-LAB a intégré il y a un an l’Ecole doctorale polytechnique Hauts-de-France. « Nos enseignants-chercheurs peuvent désormais encadrer des thèses de doctorat, confirme Andrew Glencross. Une thèse vient de commencer concernant l’influence des régions françaises dans le développement des politiques européennes, en prenant le cas de la législation sur la filière du lithium ».

Trois questions d’actualité en vue des élections européennes de juin 2024

Alors que nous allons élire, en juin prochain, 81 eurodéputés francais (sur 720 eurodéputés) quel regard porte Andrew Glencross, fin connaisseur de l’Europe et de ses institutions, sur les évolutions de la politique européenne ?

  1. L’Europe à 27 souhaite-t-elle que d’autres pays la rejoignent ?

Le rapport annuel de la Commission européenne sur l’élargissement est attendu d’ici la fin de cette année. L’Ukraine et la Moldavie ont reçu il y a un an le statut officiel de candidat. Six autres pays des Balkans ont déposé leur candidature parfois depuis de nombreuses années.

« Il semble que l’élargissement demande au préalable des réformes de l’Union européenne, estime Andrew Glencross. Cela passera potentiellement par la révision des règles de l’unanimité pour la politique étrangère. Par un renforcement des conditions imposées aux pays membres et candidats pour respecter l’état de droit. Et, pourquoi pas, par une différenciation dans le niveau d’intégration des différents pays.

« L’Europe doit redonner du sens à son projet »

Au-delà l’Europe doit redonner du sens à son projet, de l’enthousiasme aux citoyens. Et rechercher des compromis et des solutions collectives, y compris parfois temporaires, sur des problématiques urgentes, transnationales, dans une vision encore plus solidaire »

  • L’Europe a elle joué efficacement son rôle de régulation et de protection lors de la crise sanitaire du COVID et après la crise ?

« Il m’apparaît que l’Europe a su être très efficace lors de la crise COVID, grâce notamment à l’achat centralisé de vaccins alors que chaque pays ne pensait qu’à protéger d’abord ses concitoyens. L’Europe a su reprendre la main. Il faut aussi souligner l’efficacité de la politique européenne de soutien à la recherche fondamentale et appliquée, menée depuis des décennies, avec des financements très importants. L’Europe a pu booster la recherche notamment sur les maladies infectieuses, ce qui a eu un impact déterminant sur la maîtrise de la pandémie».

Rappelons aussi que le plan de relance européen de juillet 2020 qui a suivi la crise COVID a pu être doté d’un montant de 750 milliards d’euros, dont 40 milliards pour la France.

  • Comment l’Europe intervient-elle pour lutter contre le réchauffement climatique ?

« La politique de l’environnement a pris une place essentielle au sein de l’Union européenne. Elle couvre des champs très larges et se décline notamment dans le Pacte vert, la feuille de route européenne » précise Andrew Glencross.

Cela passe par un marché du carbone, un Fonds social pour le climat, des normes d’émissions des automobiles, des transports alternatifs à la voiture, comme le récent texte de loi sur le vélo… L’Union européenne met en œuvre ou projette d’instaurer une vaste panoplie d’instruments pour atteindre ses objectifs de réduction d’émissions de gaz à effet de serre à l’horizon 2030 et de neutralité climatique à horizon 2050 ».

« La volonté de faire vivre la liberté »

« Nous avons cette chance, à ESPOL, d’être au cœur de tous ces débats et de toutes ces évolutions fondamentales pour notre proche avenir. Karima Delli, députée européenne issue de notre région, Présidente de la Commission des transports, est venue présider en juin dernier la cérémonie de remise des diplômes.

Elle nous a informés des discussions en cours sur les réseaux transeuropéens des transports, la mobilité durable, les carburants durables, l’impact sur la qualité de l’air…Elle a demandé à nos étudiants, à nos diplômés et nos chercheurs de se mobiliser pour suivre ses dossiers et y apporter leurs contributions. Les rendez-vous sont pris ».

Karima Delli lors de la remise des diplômes 2023

« Les étudiants d’ESPOL reconnaissent l’ensemble des valeurs européennes que nous portons : la démocratie, l’humanisme, cette volonté de faire vivre la liberté » 

Propos recueillis par Francis Deplancke

Lucile VERVUST

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